L'hypersensible dur | Le freak et l'intensité
Pour poursuivre cette identification des croyances et réactions à l'hypersensibilité, voici le profil "Hypersensible dur". Je précise à nouveau qu'il ne s'agit que de structures de croyances et de protections. Nous pouvons selon les situations basculer d'une protection/réaction à une autre selon les situations... même si nous avons une dominante en général .
Si l'hypersensible doux se protége de la menace extérieure en s'effaçant, l’hypersensible dur lui ne s’efface pas, et même quand il croit s’effacer, on le voit toujours, et accessoirement il morfle. C’est de celui-ci dont je vais vous parler.
Ses caractéristiques
Enfants
Sensation d’être différent des autres à l’arrivée en 6e, parfois plus tôt
Trouve les autres enfants pas gentils entre eux, parfois pas gentils avec les professeurs.
N’arrive pas à jouer un rôle, ne peut s’empêcher de rester lui-même, ce qui commence à poser souci à partir du collège.
N’arrive pas à s’adapter à l’identité d’un clan en abandonnant la sienne. N’arrive pas à faire allégeance au chef de clan. Même si il le veut, n’y arrive pas. Se fait facilement mal voir. Peut devenir une tête de turc.
Se retrouve facilement isolé, seul ou avec très peu d’amis.
Peut être très à l’aise avec des plus grands ou des adultes alors qu’il est mal à l’aise avec ses pairs. Parfois soudainement très à l'aise avec un enfant du même âge, mais qui semble tout autant handicapé.
Pour les garçons peut être provocateur et “emmerder” ses profs.
À besoin de comprendre pourquoi, on lui dit souvent qu’il pose trop de questions.
A des problèmes avec les consignes qu’il ne comprend pas (elles sont incohérentes, mais comme tout le monde a l’air de trouver ça normal….). Demande souvent des précisions sur les consignes, ce qui énerve ses professeurs.
Juge ses profs sur le fond, peut dire que tel prof n’est pas bon en expliquant pourquoi, ce que ne font pas les autres (ils diront juste que le prof est con parce qu’il donne trop de devoirs par exemple)
Ne cherche pas à faire ce qu’il convient de faire mais ce qu’il pense être bon de faire. Donc ne suit pas les conventions, même s’il le voudrait. En subit les conséquences de rejet d’isolement et de décalage (sauf s’il assume, donc s’il a compris ce qui se joue, ce qui nécessite des parents qui lui confirme ce qu’il a compris, or ceux-ci sont encore en prise)
Plus ses parents sont dans la norme et le conformisme, plus il souffre de l’incohérence de l’ensemble en tentant de contrôler ses ressentis, en n'y croyant pas.
S’ennuie facilement à l’école sauf quand il investit un professeur émotionnellement.
Insomnies
Aime la stimulation intellectuelle, s’éclate en mode projet, ce qui ne lui ai jamais proposé au collège ou au lycée.
Et interpellé et attiré par des enfants comme lui, différents, mais il ne sait pas pourquoi. Pour l’extérieur c’est l’équipe des bizarres, y compris souvent pour ceux qui sont dedans.
Nouvelles générations : addict aux jeux vidéos
Il énerve les autres, surtout quand il ne s’efface pas. On le trouve bizarre ou tête à claques. Bref, il agace.
Adultes
Selon les personnes et sans avoir travaillé sur soi
Aime partager profond sinon s’ennuie… grave.
Se demande ce que pense les autres dans leur tête
Se sent globalement inadapté à la société, en manque
Ressent un attrait particulier pour la spiritualité, la vie après la mort
Peut ressentir un attrait aussi pour la métaphysique, la physique quantique
A un terrain anxieux, fébrile, cyclothymique
Ne peut se contenter de faire, doit être dans ce qu’il est sinon se sent mal. Procrastine.
Se passionne pour beaucoup de sujets et change tout autant facilement
Peut devenir obsessionnel quand un sujet le passionne
Capacité artistique, si exploitée, à forte intensité
Se retrouve facilement dans une sensation de frustration d'intensité, autant dans l'interaction aux autres que dans son travail
Intérêt pour les problèmes moraux, philosophiques, métaphysiques, politiques
Tenté par les expériences « limites », sensibilité aux addictions, à l’alcool
S’il suit les conventions sociales (études, maison revenus, carrière, etc), finit par une dépression, un burn-out ou une maladie.
Se sent incompris : au travail, dans sa famille, dans sa vie perso.
A une sensation d'incompréhension des autres latentes, ne comprend pas les contradictions extérieures
Et quand le frottement augmente
A le sentiment de vivre un échec permanent où qu’il aille
A une profond sentiment de non-sens, d’incohérence globale qui le rend anxieux
Ne se sent pas reconnu, en ressent une grande amertume (dont parfois il n’a pas une conscience claire)
Incapacité à rester salarié longtemps ou quand salarié, c’est dans la douleur
Peut être victime de harcèlement moral, devient facilement une cible
Dépression ou addictions probables, surtout jeune. L’alcool jusqu’à tard.
Peut être diagnostiqué bipolaire, asperger, schizophrène et toute autre symptômes de trouble mental. On lui prescrit facilement des anti-depresseurs ou des neuroleptiques.
Insomnies
Jeunes générations : perte totale de sens et de motivation, vision négative de la société et du monde à partir de la vingtaine (si ce n’est avant).
Jeunes générations : peut passer un bout de temps en hôpital psychiatrique ou isolé chez ses parents, enfermé dans sa chambre (jeux vidéos...).
En quelques mots
L'hypersensible dur frotte contre le monde extérieur de façon souvent violente.
Sa structure de souffrance est à vif, sa question lancinante pourrait être résumée à "C'est moi ou quoi ?".
La solitude et la non-intégration est un large sujet pour lui, car il a toujours eu le sentiment d'etre "à côté".
Il sent une puissance en lui mais cette puissance n’a pas été (suffisamment) reconnue.
L’injustice et la non-reconnaissance sont une plaie ouverte.
L’hypersensible dur se préoccupe beaucoup de la vérité. Il croit que tout le monde a la même quête d'absolu. Le monde lui paraît donc incohérent. Il se demande s’il est fou et en conclut généralement qu’il est grave atteint. Tout en se sentant potentiellement génial,, ce qui ne l’aide pas sur le plan de la cohérence intérieure, car comment combiner les deux, la sensation intérieure et sa non-reconnaissance à l'extérieur ?
D’un point de vue relationnel, le frottement avec le monde le rend réactif et peut rendre sa fréquentation compliquée. Il est à fleur de peau. La puissance qu’il sent en lui et sa non-reconnaissance le rendent intense, frustré, blessé, parfois amer.
Le rejet, l’isolement qu’il a pu vivre jeune l’ont mis en manque de ce qui le nourrit, l’interaction avec l’autre. Il est à cran. Il peut être en même temps charismatique (pour certains), et dans ses moments up, carrément leader. Mais il est aussi cyclothymique, ce qui fragilise l'ensemble.
Son intensité peut le rendre très attractif. Mais sa souffrance et surtout sa part défensive peuvent le rendre aussi toxique. Les hypersensibles doux sont souvent magnétisés par les hypersensibles durs, qui eux trouvent un apaisement et une rassurance dans l'hypersensible doux. Mais le cocktail peut être explosif tant que les blessures les plus à fleur de peau n'ont pas été libérées.
Quand l’hypersensible dur met du sens sur le frottement, quand il commence à comprendre ce qui s’est passé, les symptômes du frottement disparaissent petit à petit, et apparaît alors celui qu’il a toujours été, un magicien.
Ce qu’il a compris du monde et comment il s’en protège
Le HS dur aspire comme le doux à la bienveillance et la connexion entre les gens. Mais sa quête absolue, c’est la vérité.
Petit, ce qu’il a compris du monde et de sa menace a été : “Ce monde est menaçant mais surtout il est incohérent. Je veux être intégré mais je ne ferai pas semblant pour ça. Je veux la vérité car je la sens et je sais que j’ai raison (quelque part) ». Cela le mène à une quête permanente de vérité et une forte sensibilité à l’injustice.
Manque de pot pour lui, il croit que les autres ont la même quête car c’est ce qui est dit. Ce n’est pas le cas, les règles du jeu sont pipées. Il souffre donc toute sa vie (une partie) en croyant que les règles sont claires et qu’il perd. Ce sera donc à lui de découvrir le pot aux roses. Mais le découvrir, passé 40 ans, c’est découvrir aussi qu’on a joué 40 ans avec des dés pipés. C’est un mauvais moment à passer. Mais ce n’est qu’un court moment…
Deux grandes souffrances pour l’HS dur : l’isolement et la non-reconnaissance.
L'isolement
Lui qui est plein de vie et qui aspire à se connecter aux autres, à les impacter, à faire avec les autres, se retrouve à vivre une bonne partie de son adolescence, parfois son enfance, et souvent une partie de sa vie adulte (jusqu’à la crise et la re-construction) isolé ou avec très peu d’interactions. C’est une souffrance sans nom. Il ne comprend pas pourquoi. Il suppose qu’il a un gros, gros problème. Je ne reviendrai pas sur le pourquoi ici, ça fera partie des textes suivants (et il y a matière).
Globalement, on peut juste dire qu’il ne joue pas le même jeu que les autres. Il ne sait pas se conformer ou plutôt il a choisi, inconsciemment, de ne pas se conformer. Par ailleurs, ses parts défensives peu
S’il a compris que ses règles ne sont pas celles des autres, il garde confiance en lui et se met en observation sur les autres, pour les voir jouer selon leurs règles. Souvent il choisit alors d’y jouer. Il se sent seul mais il sait que le problème vient de l’extérieur. Il ressent alors un certain mépris pour le système, ce qui est toujours mieux que se mépriser soi-même. Il réussit, il est intégré, il est génial, mais son adaptation lui coûte malgré tout au fond, surtout s’il est dépendant de son environnement. Ce profil est celui assez étrange de l’hypersensible dur « adapté mais lucide » que je n’aborderai pas ici mais dans un autre article. C’est le profil de Didier Raoul, Kersauson ou Albert Einstein. Il ne vient généralement pas chercher un coaching, la souffrance est limitée.
Question intégration, on constate des variations selon le lieu de naissance et la génération. Ceux qui ont vécu à la campagne s’en sortent mieux qu’en ville. Ceux qui ont grandi en Afrique s’en sortent (beaucoup) mieux que ceux grandis en France (d’ailleurs ils ne se font pas repérés, ce qui veut tout dire). Ceux nés dans les années 30, 40, 50 et jusqu’aux années 70 s’en sortent plutôt mieux que ceux qui sont nés après.
En revanche la blessure de la non-reconnaissance semble être la même. Elle varie ensuite surtout en fonction du frottement. Plus le frottement est violent, plus la réaction est à vif, l’amertume et la « presque-folie » poussés à bout, et moins l’HS dur pourra « entrer dans la structure » et avoir les attitudes de confiance en lui qui lui permettront de récupérer quelques graines de reconnaissance.
La non-reconnaissance – La plaie ouverte
L’autre souffrance : la non-reconnaissance. Jeune ou adulte, sa vie est une succession de ressentis, de lumières, d’intuitions, d’idées, de créations, de visions, puissants et vrais. Il sait avant les autres, il voit ce que les autres ne voient pas, il ressent ce que les autres ne semblent pas ressentir. Ca a l’air plutôt sympa sur le papier, mais le problème, c’est qu’on ne lui en donne crédit. Et c’est logique : le monde n’a pas envie de lui donner crédit. D’une part parce que le monde privilégie la sécurité avant tout. Or ses vérités sont souvent dérangeantes. D’autre part parce qu’il contredit par sa nature les règles du monde. Il dérange l’ordre.
Le HS dur est donc tiraillé. D’un côté il constate la force de son jugement, de ses visions, de son intuition. Il ne peut pas faire semblant de ne pas la voir. Elle est là, elle se déploie chaque jour. Mais d’un autre côté, c’est comme si cette force n’existait pas, faisait pschitt en permanence. Pis, quand il l’émet, quand il l’utilise, il commence à avoir problèmes. Il se fait des inimitiés. Il agace. Il devient la cible de critiques, souvent incohérentes. Être contesté par des arguments qui ne devraient pas tenir… mais qui, de façon surprenante, sont retenus. Là encore, selon la confiance qu’il s’accorde, il s’échine indéfiniment et se désespère, ou il laisse le jeu se dérouler sans lui et il s’esquive. Dans ce dernier cas, il a déjà compris ce qui se joue. Dans le 1er cas, il ne comprend pas et il s’acharne. Et est détruit par la matrice sécuritaire.
Dans cet acharnement, le carburant est ce tiraillement permanent entre son sentiment de puissance et de vérité, et le doute d’être fou, névrosé, handicapé. Son acharnement s’explique : il espère toujours que ça fera sens à un moment ou un autre, que les réactions seront, enfin, cohérentes. Donc il attend, il argumente. Il explique. Il se bat. Il se lamente. Et ainsi de suite. Jusqu’à ce qu’il capte les « vraies » règles. En tout cas celles des gens dont il attend indéfiniment la reconnaissance.
Il sent ses émotions mais les juge
Le HS dur est fortement connecté à ses émotions qu’il juge, parfois qu’il déteste (dans ses moments les plus sombres) et auxquelles il essaye de résister. C’est de bonne guerre, le frottement rend ces émotions intenses : la peur, l’amertume, la tristesse. Et en y résistant, il les rend incontrôlables et envahissantes. La résistance aux émotions le tue de l’intérieur (lui comme d’autres).
Parfois, il bascule dans la fermeture du cœur. Comme il ne fait jamais tout à moitié, il se ferme totalement aux émotions. Il devient manipulateur et potentiellement très toxique. Mais il n’est pas en train de lire cet article.
Certains, beaucoup chez les jeunes, font des séjours en HP et sont sous médicaments pour “étouffer” leur sensibilité et les symptômes de leur résistance (profondes angoisses, mal-être, TOC, etc.). L’hypersensible dur peut être sujet à des attaques de panique, en réponse à ses tentatives de contrôle des émotions.
Longtemps, le HS dur pense que ses émotions l’empêchent de s’intégrer, d’être conforme. Pourtant il ne veut pas l’être, conforme. Il sent bien la vérité en lui. Mais il souffre de sa solitude. Il veut être avec les autres. Il se pense prêt à tout pour ça, y compris se conformer, mais ce n’est que le point de vue de son conscient. Son inconscient lui dit non et en fait… c’est non. Il ne peut pas faire semblant. Ou quand il le fait, ça ne marche pas.
Ce cœur ouvert le met en contact avec sa créativité, son intuition, ses visions et ses ressentis. Mais ce cœur ouvert le fait souffrir tant qu’il n’a pas compris que ses règles, valeur et vérité, ne sont pas la règle jouée : la sécurité. Quand il accepte de voir que les dés sont pipés depuis toujours et que le monde joue à un autre jeu que celui annoncé, il peut alors arrêter de se regarder le nombril (parfait au demeurant) et commencer à regarder autour de lui. Il peut accepter le frottement passé, accueillir les émotions en lien avec ces blessures et enfin donner plein crédit à ce qui se passe en lui.
Ses enjeux
Il a besoin de comprendre, comme tous les hypersensibles, pourquoi il a vécu toutes ces situations malmenantes.
Il a besoin de comprendre que tout le monde ne joue pas avec les mêmes règles, même si c’est l'apparence.
Il a besoin de saisir que tout le monde ne cherche pas l'intensité et la vérité, mais que la sécurité est une grande quête. Et elle est souvent dissimulée.
Il a besoin de prendre confiance dans ses ressentis.
Son frein principal : il peut avoir une part mental extrèmement résistante et défensive. C'est donc quand il est désespéré ou quand cette part résistante est extrèmement malmenée par la vie qu'il arrive à libérer ses blessures intérieures.
Comments